Pieuse Birmanie : envoutée et envoutante
Les photos de l'articles précédents sont inserrées... pour le plaisir des yeux...
Du 3 Mai au 20 Mai :
Agréablement surpris par le confort du bus de nuit, nous nous réjouissons du levé de soleil sur Mandalay, la dernière capitale royale birmane... la gare routière est moins glamour, ressemblant plus à un terrain vague où sont entreposés vieux bus et camions. Il est 5h30, l'animation bat son plein, la population est déjà bien active. De vieux picks up sont chargés de marchandises et de personnes sur les toits, pour se rendre dans le centre ville. Nous faisons de même...
Un bol de nouilles au petit déjeuner et c'est parti... on se lance à la découverte de cette ville grouillante : les femmes portant sur la tête des fleurs, des objets de vannerie, des fruits en vente ambulante. Beaucoup de vélos, pousse pousse s'agglutinent aux intersections des routes, chacun essayant de se frayer un chemin. 
La ville aux 150 monastères est très étendue, le scooter se révèle être un bon compromis pour visiter les alentours. Nous sommes intrigués par une fabrique de feuille d'or (24 carats), au procédé ancestral : les hommes battent en cadence une masse sur les feuilles qui s'affinent et s'agrandissent, celles ci seront vendues aux fidèles pour coller sur le Bouddha du Temple Mahamuni en signe de porte bonheur.
Ce lieu de prière est le plus prestigieux et vénéré de la région. Les hommes (seulement) se ruent sur Bouddha pour coller les feuilles d'or, ce qui témoigne une certaine dévotion populaire. Lors de la visite, nous assisterons par hasard à une cérémonie d'entrée au monastère des garçons comme moines et des filles comme nones. Les familles ainsi que les futurs jeunes moines sont vêtus d'habits traditionnels aux grandes fioritures et make up (même les garçons !!)... avant de passer à la tonte des cheveux et à la tenue pieuse. Tout homme bouddhiste doit faire au moins 2 retraites au monastère en tant que moine dans sa vie. Pour les filles cela est facultatif.
Le couché de soleil sur la colline de Mandalay se mérite : 1700 marches à gravir pour rejoindre la pagode qui scintille sous ses mosaïques de miroirs et offrant une vue à 360° : palais royal, champs verdoyants, des dizaines de pagodes éparpillées...
Le spectacle des fameux "Moustaches Brother" est dans notre programme. Cette troupe familiale a une renommée nationale pour ses spectacles comiques et burlesques sur les danses traditionnelles et la vie birmane sous l'oppression politique. Les acteurs ont été incarcérés plusieurs fois par la junte militaire pour avoir critiqué le gouvernement. Soutenus par Amnesty International, ils ont été libérés, mais sont contraints de jouer à domicile et qu'en anglais pour les touristes. La représentation n'est donc plus ce qu'elle était, la vie birmane représentée y est un peu fade mais c'est à voir pour son côté décalé !! Bonne tranche de rire…
Nous prenons un guide à moto pour nous conduire les 2 prochains jours, afin d'avoir des explications sur les lieux visités. Suite à nos questions sur les derniers évènements politiques, il nous emmène tout d'abord, dans le bureau du parti NLD : National League of Democratie. Le responsable est fier de nous dire que depuis un an, ils peuvent dire haut et fort leur appartenance politique sans craindre à des représailles de la junte. Il nous explique les différentes dates importantes qui marquent l'ouverture du pays... et exhibent des cadres photos de Daw Aung San Suu Kyi (leader du parti, prix Nobel de la paix 91) avec Hilary Clinton... Il nous distribue des stickers du parti pour nous remercier de notre venu.
Nous espérons que cette assouplissement du régime politique n'est pas un leurre du régime, et va tendre à l'ouverture du pays. Même si au quotidien, à travers nos yeux de touristes, peu de signes de répression apparaissent : les jeunes sont connectés à tous les sites internet dont Facebook contrairement à la Chine, la présence militaire est quasi nulle dans les rues des villes.... les sourires, la joie de vivre de la population nous en font oublier le contexte... mais nous savons que les apparences peuvent être trompeuses…
A Amarapura, nous visitons le monastère de Mahagandoyon qui abrite l’école d’éducation générale pour les enfants défavorisés. Il y vient plus de 1000 jeunes moines. Nous avons la chance d’être spectateurs de leur procession pour la distribution du seul repas de la journée. Ces écoles sont financées grâce aux différents dons des croyants, lors de nombreuses quêtes dans les rues : passage de chars sous les chants bouddhiques, ou des boites à offrandes dans tous les temples. Les moines novices, c’est-à-dire moins de 3 mois au monastère sont vêtus de blanc, contrairement aux autres qui sont en dégradé de marron, orangé. Ce moment est digne d’un rassemblement militaire, les jeunes en rang serré, avancent dans le silence le plus total. Ils aspirent au respect, nous resterons peu pour ne pas déranger…
Le Samedi 5 Mai est la fête de la naissance de Bouddha, nous arpentons la campagne en scooter pour scruter les pagodes décorées pour l’occasion, quand sur la route de Sagaing, un défilé de femme en tenue de cérémonie attire notre attention. Hasardeux, nous les suivons pour savoir ce qu’il en est…
La belle aubaine : il s’agit d’un regroupement de 15 villages en l’occasion de la naissance de Bouddha. En quelques minutes, nous sommes enchantés d’être 3 spectateurs blancs de marques (filmés par la chaine de télévision locale). Chaque village est représenté par une couleur, les longyis sont tous plus beaux les uns que les autres… Une fanfare suit le cortège se dirigeant jusqu’à la pagode pour y déposer les offrandes (fleurs) et arroser l’arbre banian représentant Bouddha, en signe de protection.
Cette fête est très joyeuse et mobilise une foule de spectateurs, les rues sont bondées : des buvettes, des mini kermesses pour les enfants… des hommes déguisés pour l’occasion se prêtent même au jeu… Les gens nous souris, nous offrent à boire, nous remercie de participer… on se régale, on en prend plein les yeux et les oreilles… La religion est omniprésente dans la vie quotidienne birmane, ils savent rendre l’évènement religieux attrayant pour tous et festif.
Après toute cette chaleur humaine, rien de tel qu’un peu de calme au sommet d’une colline pour retrouver nos esprits en admirant le chapelet de pagodes dans le paysage. Puis un couché de soleil mythique sur le fameux pont U Bein clôture cette belle journée. Sur plus de 1 km de teck, pour franchir le lac, le pont trône et accueille ses admirateurs… nous sommes aux premières loges : un cocktail de fruits frais à la main sur un petit ilot… exquis !!
Nous avançons plus dans le Nord de la province Chan, en gagnant la petite bourgade de Hsipaw. Le bus datant des années bissextiles, est plus fournis en cageots de mangues, bidons d’essences ou vannerie que de passagers !! C’est donc les genoux sous le menton que nous passons 6h au milieu des routes de montagnes défrichées. Karine nous quittera pour effectuer une plus grande rando…
Quelques jours au frais et au vert, dans une campagne paisible, où les autochtones sont très chaleureux avec le peu de touristes venant se perdre ici… Au programme : balade entre champs jaunis et rizières verdâtres, sieste, découverte de chutes d’eau, lecture et dégustation de plats typiques shan : soupe de nouilles avec une délicieuse sauce tomate, qui n’a rien à envier aux italiens !! On apprécie la fraicheur des hauteurs et la petite couette pour dormir…
Mi Mai : loin de tout et coupée d’internet, j’apprends à mon insu que la France a changé de Président : mon œil accroche sur un visage connu dans la presse birmane… je dirai juste : « au revoir le nain!! » Les locaux se donnent à cœur joie de commenter nos élections… 
Il faut retrouver la fournaise de Mandalay pour passer une journée à bord du bateau public pour Bagan. Plus qu’un déplacement, une leçon de vie… C’est la première et unique fois que nous utilisons un service gouvernemental (afin d’éviter de renflouer les caisses de la junte)…et nous ne serons pas déçus … dans le comble du ridicule !! Afin de justifier le prix excessif pour les étrangers, les 10 blancs que nous sommes nous voyons parqués, dans un coin du pont supérieur sur des chaises en plastiques, alors qu’une centaine de femmes et enfants birmans sont entassés à même le sol avec leurs nattes pour dormir, leurs cabas, valises, caisses de victuailles rapportées de la capitale de la province… On est tous pris d’un même malaise : ce n’est pas comme ça que l’on veut voyager… il ne faudra pas longtemps pour que l’on renonce tous à nos sièges, laissant du coup plus de place aux familles et permettant une proximité et des échanges…
L’ambiance y est conviviale, des femmes se frayent un passage entre un méli mélo de jambes, plateaux sur la tête pour écouler leurs sucreries, brioches, fruits secs… un beau mélange de couleur entre habits fleuris, à carreaux, flashis… Un levé de soleil éclabousse leurs beaux visages faisant ressortir les traits décoratifs du thanakha sur les joues des femmes, véritable coquetterie… Je ne peux m’empêcher de prendre des photos. Celles-ci se font un plaisir de poser, honorées que je les ais choisies !! Elles prennent alors un air sérieux voir solennel… je dois user de stratèges, et grimages pour les photographier au naturel riant à pleine dent !! Elles ont un sourire si spontané et rayonnant… Elles prennent plaisir à se voir sur l’écran… Après ça, on se remercie mutuellement en partageant notre nourriture et quelques cadeaux (parfum et bijoux) qu’ils me restent… des regards complices d’au revoir lorsqu’elles débarquent…
La descente du fleuve est très très longue. Chacun à ses provisions et mange à toute heure sucré ou salé pour patienter. Les femmes papotent entre elles, se montrent leurs achats de Mandalay, allaitent les bébés, occupent les plus grands.. Pour notre part, nous lisons, nous nous délectons de les regarder vivre, nous admirons le paysage : d’abord en relief et panaché d’habitations, pagodes et végétations, puis de vastes étendues plates recouvertes de sables… 
Le bateau, et ses 2 uniques passages par semaines, sert à ravitailler les villages reculés. A chaque corne de brume, on voit des habitants s’approcher des berges de sables, sortant de l’horizon pour récupérer leurs femmes et les marchandises. C’est un balai d’aller et venu, comme des petites fourmis s’agitant à des taches bien précises, dans des cris d’ordres, d’appel… Nous avons l’impression d’être à une autre époque : lorsque l’on débarque sur une plage, les hommes chargeant les charrettes tirées par les buffles… C’est l’occasion aussi pour les femmes de ces villages de faire commerce, alors elles investissent les lieux, avec la corbeille sur la tête pleine de fruits frais, de beignets, brochettes… On se demande comment ils s’y retrouvent entre ceux qui montent et descendent !!
Au fur et à mesure que la nuit approche, le navire reprend son calme, une dame que j’ai prise en photo dans le matin, s’installe à mes côté pour échanger… elle m’apprendra à me badigeonner de thanakha…
L’arrivée sur Bagan est moins charmante… lieu très prisé des touristes, que les motos taxis attendent de pieds fermes… Je vous laisse imaginer après 15h de bateau, les rudes négociations pour baisser le prix enflammés des taxis, nous voyant comme des dollars ambulants !!
Après une bonne nuit de récupération, nous commençons par faire le tour du marché local, une première partie est consacrée à l’artisanat, nous en profitons pour acheter quelques souvenirs. Et nous sommes surpris par la requête de plusieurs vendeurs, ils acceptent un accord de prix en échange d’1 ou 2 échantillons de parfum ! Je ressorts le reste des mes petits cadeaux… Et me voilà, carrément en train de troquer (à la demande du vendeur) un de ses articles contre plusieurs fioles.. En vrai expert, il m’en refuse quelques une où le nom du parfum est effacé, il les jauge, les renifle… c’est trop marrant de se prêter au jeu !!
La seconde partie du marché est plus rustique, les étales sont au sol, on retrouve les beaux sourires dénués d’intérêt. La couleur bigarré des stands, ainsi que les odeurs tant alléchantes que nauséabondes resteront gravés…
C’est à vélo que nous nous laissons charmer par le centre archéologique de Bagan, datant des 11- 12 èmes siècles. Le site de Bagan est le rival des Temples de Angkor au Cambodge. Cité construite sous l’ordre de plusieurs rois en 200 ans. Le lieu témoigne de la ferveur populaire au Bouddhisme.
Des pagodes ayant poussé comme des champignons sont répandues dans les plaines arides. Je suis époustouflée par la vue enchanteresse : des temples à perte de vue, non loin le fleuve Irrawady et en arrière plan les collines. La route principale est ponctuée de chemins de terre au détour desquelles on découvre ces vestiges en brique rouge, ou pour certains blanchis à la chaux.
Il y a plus de 2000 pagodes, sanctuaires, pagodons répertoriés, en majorité restaurés. La chaleur est torride, le thermomètre indique 45°. Au moment les plus chauds de la journée, nous nous réfugions comme les locaux dans la fraicheur des temples, ou trouvons une piscine d’un hotel luxe pour barboter !! Nos pieds auront pris un sacré coup de chaud sur les dalles brulantes, car la majeur partie des sites se visite pieds nus !!
Les bâtiments nous livrent différentes facettes de leur architecture selon l’heure de la journée, jouant à cache cache avec le soleil.. Pour finir sur des couleurs orangés.
Depuis le sommet de quelques uns, c’est un autre aspect de l’horizon qui laisse percevoir les flèches dorées entre la brume et les arbres, une belle magie s’opère au moment du couché de soleil…
A l’intérieur des stupas, des statuts de Bouddhas de toutes tailles, des fresques représentant la vie de Bouddha… la population y prie, sieste, mange en famille… les lieux restent calmes et peu bondés, ce qui est reposant…
Les soirées sont calmes et souvent dans le noir, suite aux nombreuses coupures de courant, comme un peu partout dans le pays…
Un spectacle de marionnettes birmanes nous permet de se plonger dans des scènes de vie typiques du pays. Ces bonhommes de bois sont très populaires, les artistes ne jouaiet pas au théâtre, à visage découvert.
Pour finir ce périple éprouvant par la chaleur, nous gagnons les hauteurs du Lac Inlé. Nous laissons les paysages sableux monotones pour le relief, les terres ocres, et les bocages verts. Sur les routes de petites échoppes vendent essence et whisky. L’alcool est aussi un fléau en Birmanie, des grandes banderoles à l’effigie des marques du pays…
Nous nous posons dans la campagne près du 2nd plus grand lac du pays, dans l’état shan (ethnies montagnardes).
Les nombreux marchés du coin, permettent aux 2 ethnies de troquer leurs différents produits. Les shans coiffés d’un tissu coloré à carreaux se distingues des autres portant les traditionnels chapeaux de paille.
Un tour en petite pirogue à moteur permet d’apprécier l’étendu du plan d’eau. Des zones marécageuses laissent un flou sur les limites du lac, le rendant encore plus grand…
Des jacinthes d’eau et autres végétaux aquatiques flottent et obstruent parfois la navigation, tant le niveau est bas en cette fin de saison sèche.
Je suis admirative devant le mode de propulsion des barques à fond plat des pêcheurs. Ils avancent avec une jambe enserrant la pagaie et l’autre effleurant l’eau pour garder l’équilibre. Les mains libres, ils déploient méthodiquement leur filet. Je ne me lasse pas de les regarder manœuvrer.
La curiosité de ce lac ne s’arrête pas là !! Des villages entiers sont bâtis au milieu du lac sur pilotis. C’est l’ethnie Intha arrivée au 14 ème siècle, qui eut l’ingéniosité d’investir le lac, les montagnes étant déjà occupées par les shans. Ils s’en servent aussi comme source de revenus en créant de toute pièce des jardins flottants. Il s’agit de longues bandes de terre, herbes aquatiques entassés sur un mètre, permettant de cultiver fruits et légumes… Ils approvisionnent une bonne partie du pays !! Nous avons l’occasion de déguster, à souhait, les tomates fraichement cueillies !!
La vie lacustre est bien organisée, les maisons de bois alignées, le dessous des pilotis servant de garage et débarras. Tous possèdent barques et petits enclos à poules ou cochons surélevés !!
Balade à vélo dans les nombreuses rizières et canaux, où il y fait bon, grâce aux températures clémentes. Les pluies de fins de journée annoncent la mousson… Derniers moments au calme avant le retour sur Yangon... je savoure... au fond du lit... malade !!
Le dernier trajet en Birmanie sera sport, un bus de nuit au confort sommaire pendant 14h, après une panne technique au bout d’une heure, et une crevaison en pleine nuit au milieu de juste rien… heureusement qu’ils ont l’habitude du système débrouille !!
Dernière journée à Yangon où les prémices de la saison des pluies s’abattent sur nous, en moins d’une heure les rues sont recouvertes de 10 cm d’eau, nous sommes obligés de marcher sur les routes où l’eau nous arrivent aux chevilles… je ne préfère pas regarder au sol, tant il y a d’objets non identifiés flottant… à cause des évacuations d’eau inexistantes. Les rats nagent en plein bonheur, au propre comme au figuré dans ce bain de souillure!! C’est marrant, l’ironie du sort : en début d’aprem (avant la pluie) je m’amusais à prendre en photo les tas d’ordures entassés sur les trottoirs, à côté des stands de vente de bric et de broc !!
Dernier repas dans le quartier indien, je ne me lasse pas d’admirer la mixité des habitants, aux caractéristiques propres à chaque culture mais vivant tous ensemble … de celui à côté de nous mangeant son plat avec les doigts, du birman utilisant la fourchette et la cuillère, de celui mangeant avec les baguettes…
Aux influences indiennes et chinoises, les Birmans savent conserver leur propre culture, ce qui en fait un pays envoutant, passionnant, intense, fatiguant mais tellement riche humainement…
Voilà mon voyage touche à sa fin... je suis encore dans ma bulle, ne réalisant pas le retour en France, pourtant si proche... au moment où je termine ces lignes je suis a Shanghai... attendant l'avion pour Paris...
Je suis contente du chemin parcouru, les bons comme les durs moments...
L'horizon s'offre à moi pour un avenir encore incertain... Mais qu'il est bon de vivre au jour le jour et de profitez de tous les instants... et des occasions...
D'ailleurs la famille, les amis m'attendent pour en profiter !!! A très vite...
